vendredi 29 décembre 2017

Les 7 merveilles du monde antique

Les Pyramides de Khéops (Egypte, seule merveille encore visible)
Les Jardins suspendus de Babylone (Irak)
La Statue de Zeus (Grèce)
Le Temple d'Arthémis (Turquie)
Le Mausolée d'Halicarnaso (Turquie)
La Statue de bronze d'Hélios (Grèce)
Le Phare d'Alexandrie (Egypte).

vendredi 15 décembre 2017

A nos lecteurs, fidèles mais rebelles!

Vous l'aurez noté, le numéro d'hiver de Scènes de chasse en Bavière n'est pas paru. Et pour cause: toute la rédaction (bureaux à l'étranger compris) est mobilisée sur l'écriture d'un ambitieux roman, fait d'intrigues, de football et de première personne du singulier. Scènes de chasse vous donne rendez-vous, au mieux, au printemps, début avril. D'ici là, de nouveaux posts continueront de paraître chaque semaine sur ce blog.
Allez, bon week-end!
S. D. C. E. B.

lundi 11 décembre 2017

Isidore et son casque Vietnam

C’est l’hiver 92, je suis en 1ère Eco dans le 7ème à Paris. En début d’année, je rencontre un mec dans ma classe, branché armée-aventure. Il vient en cours habillé à la mode, genre doudoune Schott, chemise Ralph Lauren… mais avec des rangers de l’armée US. Rien de choquant mais ça m’intrigue, c’est un bahut de bourges. Un jour, à la pause de midi, je le vois assis sur un banc avec un catalogue « Doursoux, surplus militaire ». J’hallucine. Catalogue énorme, je sais pas combien de pages, tout en couleur, classé par rubriques : vêtements, bivouac, insignes… On commence à bavarder, il me passe le catalogue et là je me dis : « Woah ! ». En fait, je veux tout ce que je vois dans le bouquin. Genre une petite housse à chargeur que tu passes à la ceinture. J’ai pas de chargeur mais je me dis que je pourrais foutre mes clés dedans. Al’époque,  moi  aussi,  je  suis  branché armée.  Je fais des maquettes militaires, je mate des docus sur la 2ème guerre mondiale à la télé et j’ai un patch « POW-MIA » cousu sur mon sac de cours. Un Chapelier, tu te rappelles ? C’est quoi « POW-MIA » ? Un insigne noir avec la silhouette d’un GI et au loin, un mirador : c’est pour tous les prisonniers de guerre et les portés disparus.

Bref, mon pote voit que je suis à fond et du coup, il me prête le catalogue. Je rentre chez moi après les cours, je dîne et je vais me coucher avec Fun Radio. Avant d’éteindre, je sors le bouquin du sac à dos et je me régale. Je chope un bout de papier et un crayon et je me fais une liste des insignes que je veux acheter : chasseurs alpins, paras, 2ème DB… Dans ma chambre, j’ai un grand meuble à tout faire : placards, bureau, un lit qui monte et qui descend, et aussi des vitrines. Je tourne les pages et je tombe sur la partie « Collection ». Et là, qu’est-ce que je vois ? Un casque américain, vintage, porté pendant la guerre du Vietnam. Bam ! On arrête tout, c’est ça que je veux. Je précise qu’à ce moment-là, mes maquettes, c’est des décors de jungle, des GI qui lisent Playboy dans un bateau qui remonte la rivière, ou un grand hélico qui vient chercher des mecs dans les ruines d’un temple bouddhiste. Je lis plein de choses aussi sur cette période : la revue Nam par exemple. Un truc des éditions Atlas qu’on trouve chez les marchands de journaux. Y’a la pub à la télé. Mais j’imagine que le casque est pas donné. Je regarde : 300 francs. Quoi ? C’est rien ! 300 francs, ça fait 45 euros, je sais pas si tu vois. Et je commence à planifier une virée au surplus.

Pourquoi planifier ? Je suis fils de prof et à l’époque, j’ai des sales notes en cours. Donc, pas le droit de sortir, de faire des trucs de mon côté… Après les cours, je rentre direct : ma mère a mon emploi du temps scotché dans la cuisine, elle sait à quelle heure je sors. L’enfer. Donc faut que je sois malin. Et là, gros coup de pouce du destin : j’ai un cours de Français qui saute un jeudi en fin de journée. J’ai deux heures. C’est jouable mais c’est ric-rac. Mon bahut est dans le 7ème, Doursoux à Montparnasse. En métro, c’est déjà une bonne demie-heure. Tu rajoutes le temps dans la boutique, et le temps de rentrer à Boulogne où j’habite…

Donc, le fameux jeudi, je sors de cours et je fonce au métro. Je suis comme un ouf. J’ai une seule angoisse, c’est qu’on me dise : « Ah désolé, le casque est déjà vendu ». J’arrive vers Montparnasse, j’ai le plan des rues dans ma tête : c’est dans une petite impasse derrière la Tour. Mais quand je sors du métro, il fait nuit (c’est l’hiver je te rappelle) et je me paume : je descends le boulevard Pasteur, je fais demi-tour, je monte du côté de la gare, idem. Je regarde ma montre, j’ai déjà 20mn dans la vue.  Finalement,  je  demande  au bistrot mais personneconnaît l’impasse. Je retourne alors vers la station et au loin, je vois des drapeaux qui flottent à l’entrée d’un magasin. Putain c’est là ! Je coure avec mon sac sur le dos. Y’a un scaphandre à la porte, des cantines kaki, un filet de camouflage… Le paradis. Entre parenthèses, à 16 ans, tu t’arrêtes à l’esthétique, à l’imaginaire… Tu te dis pas que la guerre, ça fait des morts. Enfin moi en tout cas.

Je rentre là-dedans, je reconnais tout ce que j’ai vu dans le catalogue. Finalement, je tombe sur l’étagère des casques et je vois celui que j’ai repéré. Ils en ont plusieurs en fait. Je chope un vendeur, il les descend. Je compare les camouflages, je paye à la caisse, je fais rentrer le bordel dans mon Chapelier et je fonce au métro. Je suis archi à la bourre. J’arrive sur le quai, problème sur la ligne. Je me dis « Merde ! » et je commence à préparer un mytho pour mes parents : « Ouais, ils nous ont gardé plus longtemps en cours... » La rame arrive, elle est blindée. Je fais mon changement à la Motte Picquet pour prendre la 10 et là, je réalise un truc : je suis pas du tout à la bourre en fait, je me suis gouré dans mes calculs. Mieux que ça : je suis à la Motte Picquet exactement à la même heure que d’habitude pour mon changement. Magique. Là, je me dis que j’ai une bonne étoile.

J’arrive chez moi, l’air de rien, je dîne et je m’enferme dans ma chambre. Là, je sors le casque, usé comme il faut. Il a une bande élastique kaki pour loger des clopes ou des compresses. Et dessus, au marqueur, c’est marqué « Gibson ». Le soldat qui portait le casque s’appelait « Gibson ». A un moment, je me suis même dit, « Si ça se trouve, c’était à Mel Gibson ». Mais le mec était trop jeune pour avoir fait le Vietnam. Je pose le casque sur une étagère, et le lendemain, je le customise : j’achète un paquet de Lucky Strike, en paquet souple, pour glisser sous la bande élastique. Je me rappelle aussi qu’on a un jeu de cartes américain à la maison. On l’avait gratté pendant un voyage sur la Pan Am. Ce qui m’intéresse, c’est l’as de pique. Certaines unités se baladaient avec un as de pique sous l’élastique avant de le déposer sur le corps de leurs ennemis, genre « on signe nos crimes ». On déménage quelques années après et le casque suit, toujours en bonne place.

25 ans plus tard, j’ai toujours ce casque. Pourtant, j’ai laissé tomber les maquettes et je suis anti-guerre. Mais j’y suis vachement attaché. Aujourd’hui, il sert de cale-porte dans ma chambre. Ma fiancée est pas fan mais bon… En revanche, y’a six mois, elle est tombée sur un reportage qui racontait l’histoire de l’as de pique. Du coup, elle m’a demandé de virer la carte, j’ai dit « ok », j’avoue c’est chaud. J’ai jeté les clopes aussi, elles étaient toute sèches, mais j’ai gardé l’emballage. Et « Gibson » est toujours là. Une fois par mois, je passe l’aspi sur la toile qui recouvre le caque. J’ai regardé sur Ebay, y’en pas des masses des casques comme celui-là. Ça vaut entre 150 et 300 euros. Mais le mien, je le vendrai jamais. Je crois que c’est l’objet que je sauverais si y’avait un incendie ou un truc comme ça…